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Martin Dumollard, 1855-1861 - Le tueur de bonnes

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Martin Dumollard

En résumé
  • Année: 1855, 1859, 1860, 1861
  • Commune: Lyon
  • Département: Lyon, Ain
  • Arme: À mains nues
  • Sexe: Homme

Nous sommes en 1855 à Dagneux, village de l'Ain.

Martin Dumollard, solide gaillard de quarante-quatre ans, est en route pour Lyon, une ville dont il parcoure souvent les rues, notamment autour de la Guillotière, arborant pour l'occasion un masque avenant sous lequel se dissimule un prédateur redoutable.

Sa méthode de chasse est une mécanique bien huilée, il approche des femmes auxquelles il propose une place de domestique très bien payée dans l'Ain au service d'un soi-disant notable fortuné dont il prétend être l'homme de main. Elles sont jeunes, pauvres, son scénario en séduit donc certaines dont la méfiance est endormie par sa faconde et l'espoir d'une vie meilleure. Le piège refermé, rendez-vous est pris dans les heures ou les jours qui suivent afin de se rendre chez ce nouvel employeur. Une fois dans l'Ain et à l'abri des regards indiscrets, Martin Dumollard se rue sur la jeune femme, la déshonore et la tue.

Il rassemble ensuite ses effets personnels, vêtements compris, puis s'en retourne à Dagneux, où sa femme l'attend pour faire l'inventaire du butin.

Après un peu de repos, il repart à Lyon, en quête d'une nouvelle proie. Encore et encore...

Crimes de Martin Dumollard

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Marie Baday

Durant le mois de février, Marie Baday, domestique au service d'une certaine Madeleine Aussandon, annonce à sa maîtresse qu'elle la quitte aujourd'hui même. Priée d'expliquer ce départ inopiné, elle lui dit avoir été recrutée par l'homme de main d'un notable de Miribel, dans l'Ain. La place est à prendre immédiatement et est payée deux-cents francs par an, une fortune comparée aux gages qui lui sont actuellement versés. L'annonce faite, elle s'en va rassembler ses affaires puis retrouve son recruteur qui doit la conduire à Miribel. Commence alors un petit périple, Miribel se trouvant tout de même à une douzaine de kilomètres de Lyon. Et même davantage, puisque Martin Dumollard conduit finalement Marie Baday à Tramoyes, sept kilomètres plus loin, dans la forêt de Montaverne. Profitant d'être désormais au milieu de nulle part, il lui saute dessus, abattant sur elle la sauvagerie qui le caractérise. Après avoir mis fin à ses jours, il s'empare de ses affaires et s'en va, laissant derrière lui son corps nu. Rapidement découverte par des chasseurs, la dépouille ne sera identifiée que plusieurs mois après grâce aux clichés réalisés à la demande du juge d'instruction en charge de l'affaire.

Olympe Alubert

Le 25 février, Martin Dumollard recrute Olympe Alubert. Rendez-vous est pris le dimanche suivant, le 4 mars, pour la conduire cette fois dans les environs de Mionnay où il se jette sur elle. Elle parvient finalement à se libérer de lui et à déguerpir. Plus jeune, elle le distance aisément, courant au hasard jusqu'à atteindre la ferme des Ragesses où la famille Barbet la recueille. Olympe Alubert décrira plus tard aux gendarmes un agresseur de cinquante ans plus ou moins, s'exprimant bien et inspirant confiance, ayant par ailleurs pour signe distinctif une lèvre boursouflée.

Josephte Charletty

Le 22 septembre, c'est au tour de Josephte Charletty. Chemin faisant, Martin Dumollard s'intéressant d'un peu trop près au contenu de sa besace, Josephte Charletty soupçonne que la place de domestique n'était en réalité qu'un appât pour l'attirer dans un guet-apens. À l'affût dès lors de la moindre occasion de s'enfuir, leur arrivée devant une ferme lui donne une idée: il est tard, elle est fatiguée, elle s'en va donc demander le gîte pour la nuit ; neutralisé par la présence des fermiers, Martin Dumollard ne réagit pas mais a bien compris la manoeuvre. Le lendemain matin, il a disparu. Désormais en sécurité, Josephte Charletty retourne seule à Lyon.

Jeanne-Marie Bourgeois

Le 30 octobre, Martin Dumollard recrute Jeanne-Marie Bourgeois, vingt-deux ans, avec laquelle il prend la route le lendemain. Durant le trajet, tout comme avec Josephte Charletty, son comportement devient suspect, Jeanne-Marie Bourgeois adopte alors une stratégie analogue ; lorsqu'ils arrivent devant une ferme, le domaine de Polletins, elle s'y précipite. Elle expose la situation au propriétaire des lieux, Benoît Berthelier, qui lui offre de se réfugier chez lui. Benoît Berthelier se demande si cet étrange bonhomme ne serait pas le meurtrier de Marie Baday, mais il n'aura pas l'opportunité de s'en enquérir, Martin Dumollard a pris la fuite.

Victorine Perrin

En novembre, Martin Dumollard s'attaque à Victorine Perrin, vingt-deux ans. Alors qu'ils arrivent dans les environs de Neyron, il s'enfuit avec sa petite malle contenant ses objets de valeur qu'il portait pour elle. Une fois n'est pas coutume, il se contente ainsi de détrousser sa victime, qui sera finalement recueillie par des villageois.

Julie Fargeat

Quatre ans plus tard, le 17 janvier 1859, Martin Dumollard aborde Julie Fargeat. Enceinte depuis peu et sans emploi, Julie Fargeat est aux abois, une aubaine pour Martin Dumollard qui la persuade sans effort de l'accompagner le jour suivant dans l'Ain. Durant le voyage, en proie à une pulsion autour de Saint-André-de-Corcy, Martin Dumollard commence à la déshabiller. Elle essaie de le repousser mais il insiste et finit par lui arracher ses vêtements. Julie Fargeat se met alors à hurler si puissamment qu'elle l'oblige à fuir, ayant forcément alerté quelqu'un. Et en effet, deux fermiers, Simon Mallet et son fils Louis, accourent peu après. Martin Dumollard est déjà loin, et avec lui certaines affaires de Julie Fargeat. Conduite à la gendarmerie le 20 janvier, elle n'est pas prise au sérieux par les gendarmes car elle n'a aucun papier d'identité. Elle a beau leur expliquer qu'ils étaient dans les affaires dérobées, tout comme ses économies, ils ne veulent rien entendre. C'est finalement elle qui aura à faire à la justice, pour vagabondage.

Louise Michel

Le 29 avril 1860, Louise Michel se laisse péniblement séduire par la place de domestique. Agressée le lendemain autour de Civrieux, elle s'échappe et se réfugie dans la ferme d'un certain Claude Aymond. Pendant ce temps, incapable de la rattraper, Martin Dumollard rentre chez lui. Alors qu'il coupe par un champ à Saint-André-de-Corcy, il se fait surprendre par deux fermiers qui le somment de quitter l'exploitation ; ironie du sort, il s'agit de Simon et Louis Mallet qui ont secouru Julie Fargeat l'année précédente.

Marie-Eulalie Bussod

Le 25 ou 26 février 1861, Martin Dumollard arrive par les bois à Pizay en compagnie de Marie-Eulalie Bussod. Peu de détails sont connus de cette agression, si ce n'est son effroyable conclusion. Après avoir abusé d'elle, Martin Dumollard l'a enterrée vivante. Retrouvée quelques mois plus tard, la dépouille sera identifiée par les trois soeurs de Marie-Eulalie Bussod. L'autopsie pratiquée révélera les circonstances de la mort.

Marie Pichon

Le 28 mai 1861, Martin Dumollard jette son dévolu sur Marie Pichon qui accepte avec enthousiasme les deux-cent-cinquante francs par an promis. Ils partent pour l'Ain le jour même, le temps pour elle de faire ses bagages. Martin Dumollard se montre cette fois imprudent, la conduisant dans son village, à Dagneux, où il l'agresse lorsqu'ils arrivent par les bois. Il l'étrangle ensuite avec un lasso mais elle se libère et court jusqu'à Balan où elle se réfugie dans la ferme du sieur Joly. Le fermier s'en va aussitôt chercher le garde-champêtre. Lorsque Marie Pichon lui décrit son agresseur, pensant reconnaître Martin Dumollard, le garde-champêtre décide de faire un crochet par chez lui dont il ressortira convaincu de sa culpabilité. Le 2 juin, Martin Dumollard est arrêté. Le 3 juin, Marie Pichon le reconnaît formellement. Envoyés au domicile des Dumollard afin de le perquisitionner, les gendarmes découvrent avec effroi les vêtements de plusieurs centaines de femmes, l'enquête prend alors une tournure inattendue et glaçante...

Procès de Martin Dumollard

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Le procès s'ouvre le 29 janvier 1862. Marie-Anne Dumollard, son épouse, est également jugée pour complicité.

L'ambiance est électrique. Voilà des mois que les journaux couvrent l'enquête, faisant de Martin Dumollard le tout premier tueur en série de la presse française. Affublé d'un sobriquet aguicheur, "le tueur de bonnes", il est désormais célèbre et son procès était très attendu. Près de cinq mille curieux se sont rassemblés pour le voir en chair et en os.

En plus des neuf affaires précédemment narrées, de Marie Baday en 1855 jusqu'à Marie Pichon en 1861, Martin Dumollard est accusé pour les meurtres de trois inconnues. La première fut assassinée dans le bois de Montmain, un lieu-dit de Dagneux. La justice doit la découverte du cadavre à Marie-Anne Dumollard. Les deux autres affaires, l'une à Sainte-Croix et l'autre à Lyon, sans cadavre, reposent uniquement sur des témoignages.

La perquisition menée chez les Dumollard a finalement conduit à l'incroyable saisie de 1250 vêtements ayant appartenu à 646 de femmes. S'il est certes établi que toutes n'ont pas été tuées, il n'en demeure pas moins que Martin Dumollard a vraisemblablement à son actif plusieurs centaines de meurtres. Les enquêteurs ont également recueilli de nombreux témoignages, l'audition des témoins est un interminable défilé de 71 personnes.

Le 1er février, Martin Dumollard est condamné à mort et Marie-Anne Dumollard à vingt ans de travaux forcés. Leurs avocats n'essaieront même pas de se pourvoir en cassation.

Après le procès

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L'exécution de Martin Dumollard est prévue le 8 mars 1862. La veille, il se voit accorder un repas d'adieu avec son épouse. Il est ensuite conduit dans la nuit à Montluel, dans l'Ain, où l'attend la guillotine. À son arrivée vers quatre heures du matin, malgré la nuit et le froid, une foule considérable est déjà rassemblée. Enfermé dans la salle du conseil municipal, il s'entretient en privé avec deux prêtres, un café lui est ensuite servi, puis le verre du condamné, un Madère. Vers six heures quarante-cinq, il est temps d'y aller. La guillotine n'est qu'à cent-cinquante mètres, mais étant donné la marée humaine qui attend Martin Dumollard, il lui est offert de se rendre en voiture jusqu'à l'échafaud. Il refuse, préférant parcourir à pied la route jusqu'à sa mort. Une fois devant le massicot, il s'agenouille et embrasse le crucifix qui lui est présenté, sa tête est ensuite positionnée sur le billot. À sept heures du matin, le couperet s'abat. Le tueur de bonnes est mort. Quant à Marie-Anne Dumollard, elle mourra en prison, treize ans plus tard.

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Publié par sur Caedes le 13-10-2023

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