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Françoise Geneste, 1851 - Arsenic et vieilles dentelles

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Françoise Geneste

En résumé
  • Année: 1851
  • Commune: Treignac
  • Département: Corrèze
  • Arme: Poison (arsenic)
  • Sexe: Femme

Nous sommes le 7 juin 1851 à Treignac, petite ville corrézienne de trois-mille-trois-cent habitants au pied d'un massif.

Au coeur de Treignac se trouve le collège Lakanal où élèves et professeurs finissent de déjeuner. Le repas terminé, une épidémie moyenâgeuse semble s'abattre sur l'établissement ; douleurs à l'estomac, coliques et vomissements se généralisent.

Absent lors du repas, le principal du collège suspecte à son retour le pain d'avoir été empoisonné. Il en ingère une bouchée afin de voir s'il va développer certains symptômes, finalement incommodé, il prévient la police.

Le pain est soumis à une analyse dont les résultats révéleront en effet la présence d'arsenic.

Heureusement, après quelques jours de convalescence, tous recouvrent la santé.

Il reste à trouver le coupable, tout trouvé si l'on en croit le personnel du collège: Françoise Geneste...

Crime de Françoise Geneste

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Le 1er octobre 1850, Françoise Geneste s'installe au collège Lakanal. Le principal l'a recrutée comme domestique personnel en ignorant tout d'elle, ému par cette veuve de soixante ans ou presque à la recherche d'un emploi. Il ne tarde pas à s'en mordre les doigts, endurant les mois suivants son mauvais caractère et la médiocrité de son travail. En avril 1851, excédé, il la congédie. Elle obtient de rester à son service quelques jours de plus, le temps de trouver une nouvelle situation, mais les semaines passent et elle ne semble pas affairée par ses recherches, malgré les nombreuses relances du principal et de Madame Orpélière, l'économe du collège. Au début du mois de juin, à nouveau relancée par Madame Orpélière, Françoise Geneste la menace: "Je sortirai du collège, mais vous ne tarderez pas longtemps à partir après moi !". Le 6 juin, un terme est mis à cette mascarade, elle a jusqu'au jour suivant pour rassembler ses affaires et quitter les lieux.

Toujours le 6 juin, vers dix heures du matin, Marie Fraysse confectionne du levain dans les cuisines du collège pour le pain du lendemain. Vers seize heures, revenue pour pétrir, elle surprend Françoise Geneste dans les cuisines. La domestique prétend vouloir l'aider. Soit. Marie Fraysse la laisse seule en cuisine avec le pâton à deux reprises, le temps d'aller chercher de la farine dans l'office. Une fois les pains cuits, Marie Fraysse repart un tourteau à la main, confectionné avec le surplus de pâte. Elle le regrettera.

Le lendemain matin, jour de l'empoisonnement, invitée à se restaurer avant son départ, Françoise Geneste refuse de manger du pain. Le principal insiste poliment, mais elle a l'estomac noué, le coeur trop gros de devoir le quitter... Comme il lui plaira. Au moment de partir, elle bougonne: "On me fait partir parce qu'on trouve que je ne fais pas bien le pain, on le mangera et l'on verra !".

Le soir même, Françoise Geneste se présente au collège Lakanal, soi-disant pour prendre des nouvelles du principal. Et elle recommencera le jour suivant. Son comportement est étrange, elle rode autour du collège. Le reste du temps, elle fait mine de vouloir lancer une rumeur en ville, cherchant visiblement à orienter l'enquête à venir. Feignant d'avoir reconnu un empoisonnement à l'arsenic, elle incrimine Madame Orpélière. En charge de l'extermination des rats au collège Lakanal, Madame Orpélière dispose d'une réserve d'arsenic, et elle peut le prouver, connaissant sa cachette. Mais Madame Orpélière est une femme honnête et laborieuse dont la conduite a toujours été exemplaire, personne ne prend donc au sérieux une accusation aussi grotesque.

Quelques jours plus tard, la présence d'arsenic dans le pain est confirmée. Une enquête est ouverte. Les policiers interrogent aussitôt Françoise Geneste, sûrs de tenir leur coupable. Mais elle clame son innocence.

Procès de Françoise Geneste

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Le procès s'ouvre le 31 août 1851.

Interrogée sur la réserve d'arsenic du collège, Françoise Geneste nie l'avoir évoquée et prétend avoir découvert son existence durant l'enquête. Le personnel du collège est vent debout, notamment Madame Orpélière, ayant sorti l'arsenic de sa cachette devant elle.

Concernant son refus de manger du pain le 7 juin, elle le reconnaît, l'émotion du départ n'était pas la cause. Madame Orpélière lui avait interdit d'en manger. Sidérée, l'intéressée conteste énergiquement.

Quant aux menaces, Françoise Geneste dément les avoir proférées.

Il est finalement question de la profession du frère de Françoise Geneste: pharmacien. Elle a longtemps travaillé avec lui dans sa pharmacie et en a retiré de solides notions de pharmacologie, au point d'exercer notoirement et illégalement à ses côtés la profession de pharmacien, sans jamais être inquiétée au passage. L'arsenic n'a ainsi aucun secret pour elle, raison pour laquelle personne n'est mort, la dose a été savamment déterminée.

Françoise Geneste était jusque-là une vieille femme acariâtre ayant lamentablement raté son empoisonnement, elle est finalement machiavélique. Personne n'est mort car elle l'a voulu ainsi et elle a orchestré ce procès, semant dans son sillage par son comportement et ses déclarations tous les indices pour remonter jusqu'à elle, s'assurant ainsi de signer sa vengeance. La machination est évidente mais impossible à prouver.

Après une courte délibération, Françoise Geneste est déclarée non coupable. Elle repart libre. Libre de tourmenter par sa simple présence en ville Madame Orpélière et le principal du collège Lakanal.

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Publié par sur Caedes le 18-11-2023

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