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Antoine Bardin, 1851 - Le bouillon de onze heures

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Antoine Bardin

En résumé
  • Année: 1851
  • Commune: Gerzat
  • Département: Puy-de-Dôme
  • Arme: Poison (potasse caustique)
  • Sexe: Homme

Nous sommes en mars 1851 à Gerzat, commune du Puy-de-Dôme d'environ deux-mille-six-cents habitants. Les Bardin, des paysans relativement aisés, vivent en ce moment un heureux évènement: la naissance d'Annette. Il s'agit du deuxième enfant de ce couple marié depuis 1831, l'aîné s'appelle Antoine et a dix-neuf ans.

Mais en y regardant de plus près, cet évènement n'est pas si heureux…

Monsieur Bardin le sait, l'enfant n'est pas de lui. Le père est un entrepreneur des chemins de fer ayant brièvement vécu à Gerzat de 1849 à 1850. D'abord en exil dans sa famille, Madame Bardin a finalement réintégré le foyer, son mari s'étant résigné à faire contre mauvaise fortune bon coeur ; mais pas leur fils Antoine, ses relations avec sa mère sont depuis lors exécrables, au point de rechigner à l'aider à la ferme en dépit de son état.

Antoine Bardin affiche malgré tout aujourd'hui une mine presque réjouie, semblant même vouloir entamer une réconciliation avec sa mère, et pour cause: la naissance étant prématurée, les chances de survie d'Annette sont faibles. Ils devraient bientôt être débarrassés d'elle, et sans sa présence pour les rappeler, les errements maternels seront choses du passé.

Deux mois plus tard, Annette est en pleine forme. On ne peut en dire autant d'Antoine Bardin. Françoise Girodet, avec laquelle un mariage semblait enfin se préciser après une cour assidue, l'a finalement éconduit, déçue par la survie d'Annette. Dos au mur, il lui a fait une promesse: si Annette a survécu à sa naissance prématurée, elle ne survivra pas à son "bouillon de onze heures"...

Crime d'Antoine Bardin

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Le 8 mai 1851, les époux Bardin partent travailler vers cinq heures du matin. Annette est confiée à Jacquette Durant, leur domestique.

Antoine Bardin se lève peu après et s'isole dans la grange, à quelques pas de la ferme.

Vers sept heures du matin, Annette dormant profondément, Jacquette Durant en profite pour aller au lavoir. Antoine Bardin se glisse alors dans la ferme, fait boire à Annette le contenu d'une bouteille, puis déguerpit. Lorsque Jacquette Durant revient, après seulement cinq ou six minutes, Annette souffre horriblement et rien ne semble la soulager. Appelées à la rescousse, les femmes du voisinage s'avèrent tout aussi impuissantes. Antoine Bardin apparaît alors brièvement, le temps de suggérer nonchalamment d'aller chercher un médecin.

Jacquette Durant partait justement chercher mademoiselle Forestier, la sage-femme de Gerzat, mais une fois sur place, elle n'est pas d'un grand secours, n'ayant jamais vu un cas pareil: les lèvres d'Annette sont blanches et paraissent brûlées, elle est en proie à de violentes convulsions et la douleur lui fait pousser des cris atroces. Annette s'éteint finalement le matin même dans les bras de sa mère.

Avant de prendre congé, mademoiselle Forestier dit à madame Bardin: "Conservez bien les effets que porte la petite, il se pourrait que la justice vous en demandât compte..."

Et en effet, la justice ne tarde pas à s'en mêler. Deux médecins sont envoyés à Gerzat afin d'effectuer une autopsie. Le cadavre ouvert, la cause du décès apparaît aussitôt: un liquide corrosif a dissout les entrailles. L'analyse des prélèvements confirmera la présence de potasse caustique, un poison violent agissant tel un acide.

Les enquêteurs remontent aisément jusqu'au coupable. L'origine adultérine d'Annette Bardin n'est pas le secret le mieux gardé de Gerzat, tout comme la haine de son frère à son encontre, notamment pour avoir ruiné la réputation de la famille et fait capoter son mariage avec Françoise Girodet. Et en dehors de la domestique, dont l'innocence ne fait aucun doute, il était le seul au moment du meurtre à se trouver à proximité ; sans oublier la promesse faite à Françoise Girodet, promesse largement ébruitée par l'intéressée. Placé en état d'arrestation, Antoine Bardin nie avoir empoisonné sa soeur.

Procès d'Antoine Bardin

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Le procès s'ouvre le 16 novembre 1851.

Interrogé sur le matin du 8 mai, Antoine Bardin explique s'être levé vers cinq heures et demi ou six heures, puis il s'est rendu dans la grange afin de couper des betteraves pour nourrir les animaux. Il ne prêtait pas attention à ce que faisait Jacquette Durant et il avait beau se trouver à une quinzaine de pas seulement, il n'a pas entendu les hurlements de sa soeur. Durant cet interrogatoire, comme durant le reste du procès, il affiche une tranquillité insondable.

L'entourage des Bardin est ensuite entendu, se dresse alors le portrait d'une famille blessée par l'adultère maternel, particulièrement Antoine Bardin. Françoise Girodet nie farouchement avoir été avertie de son projet funeste, elle nie d'ailleurs même avoir été, peu ou prou, sa fiancée. Également entendue, mademoiselle Forestier confirme avoir immédiatement soupçonné un empoisonnement.

Peu après dix-neuf heures et un long huis clos devant épargner au public les détails les plus sordides, les jurés s'isolent pour délibérer. Une demi-heure plus tard, ils reviennent avec leur verdict. Antoine Bardin est déclaré coupable avec circonstances atténuantes. En conséquence, la cour le condamne à vingt ans de travaux forcés.

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Publié par sur Caedes le 29-03-2024

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